Harraga - Boualem Sansal
Ce texte est l'histoire de Lamia. Poussée par la vie dans la plus profonde des solitudes, elle se meurt comme le grain de blé mis en terre et un jour d'été miraculeux éclôt en elle la chose la plus réelle et la plus imaginaire qui soit au monde : l'amour.
Il ne s'agit pas ici d'un quelconque roman à l'eau de rose mais d'un roman choc. Lamia est pédiatre, elle a 35 ans et vit à Alger. Elle vivote seule dans sa maison pleine de fantômes lorsque surgit dans sa vie une Lolita, tornade dérangeante, qui bouleversera sa vie.
Après la mort de ses parents et de son frère aîné, Sofiane, son plus jeune frère, prend le large et se fait "Harraga", brûleur de route, migrant clandestin parti chercher l'Eldorado au-delà des mers.
... j'entrais de plain-pied dans la pire des engeances en terre d'islam, celle des femmes libres et indépendantes. Dans cet état, il est préférable de se dépêcher de vieillir, d'où mes petites rides. Sous la bannière verte, la vieillesse n'est pas un naufrage pour la femme mais un sauvetage.
Je comprends surtout que les jeunes s'exilent parce que ici tout leur est fermé jusqu'au robinet. Connaissez-vous beaucoup de jeunes qui aiment la captivité ? Autre chose, pourquoi dites-vous émigration clandestine, le mot juste est exode massif... suicide collectif, c'est pas mal aussi !
Son frère est introuvable, l'agence chargé de retrouver les "disparus" semble bien peu efficace et Lamia se révolte devant ce qu'est devenu son pays.
... ils cherchent la Terre promise. Le drame, mais ils ne le savent pas encore, est qu'ils viennent de trop loin pour l'atteindre dans cette vie.
Je n'arrive toujours pas à croire que ce livre aie été écrit par un homme ! Boualem Sansal a su parfaitement se mettre dans la peau de son personnage, décrivant la tristesse, la révolte, la souffrance de Lamia, perdue dans cette ville qu'elle ne reconnaît plus.
Femme, elle n'a aucun droit, prostituée, elle doit des comptes, fille-mère, elle mérite la mort. Sacré fichu bled ! Et puis quel juge m'écoutera, je suis une femme, une célibataire, une râleuse, je ne porte pas le voile, je n'ai pas de burqa, je marche comme un I, je réponds du tac au tac, et Chérifa ne m'est rien au regard de leurs lois infernales ! Et je n'ai personne pour signer pour moi !
Un réquisitoire pour les droits de la femme, contre l'intégrisme et pour la liberté. Un grand merci à Emmyne pour cette découverte.
Merci à toi pour ce billet. J'ai aussi été impressionnée par la finesse de l'écriture de B.Sansal, une lecture marquante pour moi.
RépondreSupprimerUn de ceux que j'attends avec impatience dans la chaîne
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